Sommaire
- Les intervenants
- Le podcast
- La synthèse : Le jardin de toutes les expériences
- Les vidéos diffusées
- Autres ressources
- Les crédits
Les intervenants
- Pauline Bénéteau, éducatrice à l’environnement indépendante sous l’appellation Graine Vagabonde
- Denis Brosset, cofondateur de Terra Preta, jardin urbain aux Salins à Clermont
- Michel Jouinot, créateur du jardin partagé de Beaumont et des Jardiniers des Pays d’Auvergne de Beaumont
- Caroline Zajaczkowski, fondatrice et animatrice de la Maison du Quai à Billom, habitat inclusif et lieu de soutien aux personnes en détresse psychologique, utilisant notamment le jardin comme espace de régénération
Le podcast
Vous pouvez accéder à un enregistrement “nettoyé” – pour une meilleure écoute – de la Rencontre ici :
La qualité de l’enregistrement audio est parfois mauvaise, il nous est arrivé d’avoir quelques imprévus techniques. Nous en sommes bien désolés. Si vous connaissez une gentille IA (pas un Terminator) qui puisse nettoyer nos fichiers son, tenez-nous au courant.
La synthèse : Le jardin de toutes les expériences
Dans la vision qu’ont donnée les quatre intervenants du jardin de demain, on est à des années-lumière de ce qu’il est aujourd’hui pour beaucoup de gens : un bout de pelouse rase, privé, entouré de murs, avec terrasse, piscine et toboggan en plastique. Le jardin partagé est d’abord un potager, ce qui n’a même pas été mentionné tant ça paraissait ici être une évidence.
Sa fonction nourricière a été citée par tous, mais chacun s’est appliqué à souligner qu’il avait bien d’autres fonctions, la production de légumes étant même, éventuellement, un simple prétexte.
Pauline Bénéteau le définit comme un espace d’expérimentation, « mais surtout un lieu où on va se retrouver pour créer ensemble, un espace où on fait territoire pour apprendre et transmettre », avec encore une dimension supplémentaire : celle du lieu où « on va rencontrer le vivant, oasis de biodiversité dans la cité et lieu d’émerveillement ».
Trois modèles
Les trois autres intervenants, à travers la diversité des initiatives qu’ils représentent, ont permis de creuser ce premier aperçu de la richesse des expériences collectives. Michel Jouinot décrit l’endroit « merveilleux » où son association a reprise en main les parcelles à l’abandon, entre Beaumont et la quatre-voies, qu’il résume avec un titre de film bucolique, « Et au milieu coule une rivière ». Plus concrètement, ce petit paradis, expose-t-il, compte 19 parcelles gérées individuellement et un jardin partagé de 1200 m², auquel les jardiniers ont obligation de participer. Et finalement, en plus des légumes, l’initiative produit beaucoup de convivialité et d’échange, nous apprend son président, « car nous avons principalement des retraités, dont certains vivent seuls, qui trouvent des occasions de partager, de discuter ».
« C’est un lieu convivial, pas uniquement de production mais de relâchement assez complet, de loisir mais aussi de soin. »
Le jardin de la Maison du Quai à Billom est aussi un lieu de partage, mais dans un style et une ambiance différentes. Dans ce « dispositif d’habitat inclusif pour accueillir des personnes souffrant de troubles psychiatriques », comme le résume sa fondatrice Caroline Zajaczkowski, le jardin a d’abord vocation à se rassembler, à s’ouvrir aux voisins, à organiser des fêtes et barbecues ou à faire des siestes. « C’est un lieu convivial, pas uniquement de production mais de relâchement assez complet, de loisir mais aussi de soin ; lieu d’apprentissage aussi mais on part de loin… » Un peu plus tard dans la discussion, elle ajoutera que ce jardin « participe au premier objectif qu’on s’était fixé : la déstigmatisation du handicap ». Au moins avec les deux mamies du voisinage, qui sont passées de la peur du début à la familiarité conviviale autour de la culture des légumes.
Troisième expérience, troisième approche : avec l’îlot des Salins, l’association Terra Preta a d’abord eu une intention précise, que rapporte Denis Brosset : « Nous avons créé ce “parc pédagogique partagé”, non pas dans une perspective de production, mais initialement pour proposer un système de collecte de biodéchets, pour montrer qu’il est essentiel de ramener les biodéchets à la terre. » Dans ce contexte, le jardin était « motivé par le fait de pouvoir composter et montrer le cycle complet des biodéchets », jusqu’à leur utilisation dans les cultures. « Le jardin nous sert à parler de plein de choses, un peu aussi à produire, pour alimenter notre soupe populaire partagée du lundi, mais surtout pour arrêter le mythe de la poubelle magique : là on voit ce qui se passe une fois qu’on a jeté ses déchets », détaille-t-il.
Sur les jardins de Beaumont, lire aussi le reportage : « A Beaumont, le petit paradis des jardins potagers est en colère »
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Jardin politique
Mais il insiste aussi sur le « besoin de revoir du vert », sur le but de « grapiller sur le béton », sur le jardin comme « refuge pour la biodiversité mais aussi pour les humains », et même comme lieu militant.
« Le jardin est l’occasion de se rencontrer, de mutualiser pour faire plein de choses. »
Le jardin prend alors une dimension politique, c’est-à-dire, dans l’idée des intervenants et notamment de Pauline Bénéteau, qu’il permet de poser des questions : « Qu’est-ce qu’on fait de nos territoires ? Comment on pense nos façons d’habiter ? Qu’est-ce qu’on rend désirable en ville ? », énumère-t-elle. Et de développer : « J’ai le sentiment que la façon d’habiter aujourd’hui, c’est entre quatre murs, avec du gris, du gris, du gris. Progressivement on s’est coupé de l’expérience de notre environnement proche. » Elle rappelle un fait que nous oublions trop facilement : « Nous restons des animaux et notre lien à l’urbanisation est récent », soulignant les conséquences sur notre santé mentale.
Une interrogation que partage Denis Brosset, qui voit dans le jardin partagé l’occasion de « se demander comment vivre ensemble, de se repolitiser à travers les problématiques de l’eau, des déchets, des transports, pas en s’encartant mais en réfléchissant ensemble à ce qu’on peut faire. »
Michel Jouinot ajoute l’occasion de lutter contre « l’individualisme, le mal du siècle », et « de se rencontrer, de mutualiser pour faire plein de choses », comme échanger des légumes auprès d’une entreprise contre des cuves de récupération de l’eau par exemple.
Communauté et transmission
Le jardin, disent tous les intervenants, c’est le lieu où on fait communauté. « Les différences s’effacent », disent aussi bien Caroline que Pauline. On échange, on mutualise, on assemble des compétences complémentaires de jardinage, de bricolage, de cuisine et même de poésie. C’est intergénérationnel et interculturel, comme ils en témoignent lorsqu’un auditeur leur demande quel a été leur première expérience du jardin : trois d’entre eux évoquent leurs grands-parents tandis que Caroline parle du « jardin de Papa ».
C’est ce qui en fait aussi le lieu de tous les apprentissages. « C’est une école de la patience, de la saisonnalité, du respect du vivant », dit Pauline qui anime des séances de jardinage pour des enfants. Elle souhaite d’abord en faire un apprentissage de l’émerveillement, « central pour avoir envie de sauvegarder et de protéger. »
Michel Jouinot raconte comment il tâtonne pour éveiller la curiosité des enfants du centre de loisir qu’il reçoit au jardin. Il y a ceux qui s’intéressent au cycle de décomposition de l’humus et au rôle bienfaisant du ver de terre – découvrant qu’il ne mord pas ! – et ceux qui n’accrochent pas à la leçon, mais vont s’intéresser aux langages des abeilles, qui permet aux exploratrices de transmettre des itinéraires aux butineuses.
« C’est une école de la patience, de la saisonnalité, du respect du vivant. »
Les enfants vont ainsi de découverte en découverte, dans ce qui peut constituer « un fabuleux endroit d’extension d’une salle de classe », poursuit Pauline, où l’on peut faire même des maths en calculant la superficie d’une parcelle ou de la poésie, où l’on peut surtout rendre les apprentissages très concrets et changer les comportements des élèves : « c’est magique », dit-elle.
Sur le travail de Pauline avec les enfants, lire aussi le reportage : « Pauline Bénéteau embarque les enfants dans l’expérience du vivant »
École d’humilité
L’apprentissage n’y est d’ailleurs pas réservé aux enfants. À l’îlot des Salins, on apprend l’importance du tri des déchets, mais aussi les techniques low-tech, que ce soit au jardin ou dans l’étape suivante, en cuisinant avec une marmite norvégienne par exemple. Et parmi les résidents de la Maison du Quai, l’apprentissage se fait aussi : « au début ils n’avaient pas forcément les bons réflexes, s’habillant en dimanche pour aller au jardin », se rappelle Caroline qui les a vus se familiariser avec ce lieu où aujourd’hui « ils n’hésitent pas à faire une sieste dans l’herbe », et se sont aussi approprié les bons réflexes de tri des déchets.
Le jardin, finalement, reste le lieu de toutes les expériences. Celui où on découvre des techniques de jardinage, où on essaie des cultures ou des pratiques pour adapter la production légumière au changement climatique, où on peut se montrer créatif avec les ratages – « l’an dernier, raconte Caroline, on avait tellement de concombres que j’ai fini par faire de la glace au concombre et à en distribuer dans tout le quartier ! » – et où on apprend avant tout l’humilité, parce que rien n’est donné ni certain quand on plante ou sème des légumes.
Jardins rêvés
Pour autant, il ne faut pas se décourager, concluent les intervenants. « Quand on fait un jardin, il ne faut pas avoir de grandes ambitions », dédramatise Caroline. « Prenez des graines, trouvez un espace, faites pousser. Plus on va verdir la ville, mieux ce sera », invite Denis. « Il faut se lancer, expérimenter », poursuit Pauline. Tandis que Michel donne ce dernier conseil pour un jardin partagé : « Un des principaux problèmes dans les jardins partagés, c’est le partage de la récolte ; car il y a ceux qui travaillent et ceux qui récupèrent les légumes. Il faut absolument une gouvernance. »
A l’heure des questions de la salle, on a aussi parlé permaculture – un terme malheureusement galvaudé aux yeux de Pauline et de Denis –, de complexité des sols et de méthodes pour identifier leur potentiel.
« Plus on va verdir la ville, mieux ce sera. »
Les intervenants ont aussi été questionnés sur leur jardin rêvé. Celui de Caroline accueillerait un peu plus de volontaires ; celui de Michel est « celui dont on connaît la météo un an à l’avance » ; celui de Denis est « un jardin pas facile, pollué, où c’est un défi de ramener la vie », mais qui devient ensuite assez proche de celui de Pauline, « foisonnant, sans symétrie, avec beaucoup d’insectes, de plantes, de vie ». En somme, précise Denis inspiré par un certain jardin belge, « une petite jungle où tout donne à manger. »
Si tout ça ne vous donne pas des envies de sortir la bêche, les bottes et l’arrosoir, alors on ne peut plus grand chose pour vous…
Synthèse par Marie-Pierre Demarty
Prochaine Rencontre Tikographie :
Les vidéos diffusées
Vidéo sur le futur de l’habitat en ville
Chaîne Youtube “Citoyens, citoyennes !”
Les crédits
Merci à la librairie les Volcans d’Auvergne pour son accueil et le partenariat de réalisation des Rencontres Tikographie pour cette saison, et en particulier à Boris, Philippe, Lénaïc, Olivier et Gaëlle.
Merci à nos invités, aux participants et à l’équipe de l’association Tikographie qui porte et organise les Rencontres.
Pour cette Rencontre spécifique ont œuvré :
- Claire à la préparation éditoriale et à l’animation ;
- Damien à la prise de son et aux photos ;
- Marie-Pierre au compte rendu.
Crédit illustration : djedj sur Pixabay
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