Comment Co-cooking nourrit la convivialité

Par

Marie-Pierre Demarty

Le

Moment de cuisine ensemble à Cocooking
Cuisiner et manger ensemble. La cantine hebdomadaire de cette association clermontoise apporte les bases de tout ce qui fait un monde vivable : des liens sociaux, de la bienveillance et une alimentation saine. Prenons place autour de la table.

Le pourquoi et le comment   [cliquer pour dérouler]

La plupart de mes reportages racontent des initiatives complexes et ambitieuses, et tentent de démontrer qu’il est rarement pertinent de se laisser aller aux simplifications hâtives. Mais il existe aussi des gestes ou des initiatives simples et modestes, qui sont tout aussi importantes. Elles peuvent constituer un socle : celui de la solidité sociale qui permettra, justement, de construire des choses plus ambitieuses.

C’est ce que j’ai trouvé à Co-cooking. Une base de chaleur humaine facile à créer, première marche pour construire un système de solidarité et de sécurité alimentaire. D’ailleurs, l’association est aussi attentive à ces questions et aux initiatives sur ce sujet.

Si vous voulez en discuter, tester la cuisine du vendredi, trouver de temps en temps une alternative au kebab avalé sur le coin du bureau, passez la porte : on y est très bien accueilli.

Marie-Pierre

Trois infos express   [cliquer pour dérouler]

  • L’association Co-cooking, à Clermont-Nord, est une cantine participative qui propose à tous les volontaires de partager un repas, chaque vendredi, à prix libre. On peut venir dès le matin pour participer à la confection du repas végétarien, à partir des invendus de la Coop des Dômes et de légumes locaux achetés aux Jardins Solidaires de Gerzat. Le menu est élaboré le mardi après-midi, lors du café-menu. Et des repas sont parfois aussi proposés le samedi pour pouvoir faire une place à ceux qui ne sont pas disponibles en semaine.
  • L’objectif de l’association est de créer du lien, tout en permettant de bénéficier de produits sains et locaux à des prix accessibles. Des personnes de tous horizons s’y retrouvent dans une ambiance familiale et accueillante, autour de tablées de 10 à 20 personnes selon les jours.
  • Née en 2018, l’association tournait jusqu’à l’an dernier à une centaine d’adhérents. Elle a connu quelques difficultés après la perte d’une subvention, mais a retrouvé depuis septembre les moyens d’embaucher un animateur-gestionnaire. Elle retrouve ainsi une nouvelle dynamique.

Quand j’arrive vers la fin de matinée, le gratin de chou-fleur est déjà prêt à être enfourné. Les pommes pour le crumble sont pelées et coupées en morceaux. La farce de légumes est prête : il ne reste quasiment qu’à assembler les samosas ; les huit cuisinières et cuisiniers s’apprêtent à prendre un cours de pliage. Pas si simple de former des triangles après avoir déposé une cuiller de la préparation sur la bande de pâte.

Marius prend le coup de main rapidement et transmet le « truc » pour les réussir. Hélène s’empare du pinceau pour les badigeonner. On est indulgent avec celles qui produisent des formes plus proches du rectangle ou du trapèze ; ce sera bon quand même. L’essentiel est de participer, ou simplement d’être là si on se sent maladroit ou la vue trop faible pour donner un coup de main.

L’essentiel, en fait, c’est d’être ensemble et accueillant pour tous, de participer à la convivialité.

Atelier samosas
Au menu de la matinée de cuisine, la fabrication de samosas. Marius transmet le coup de main pour le pliage.

Derniers préparatifs

Bientôt, les deux plaques de samosas sont remplies. On a compté deux triangles par personne et même un peu plus, car il y a toujours quelques personnes qui viennent déjeuner sans s’être annoncées. Si besoin, il reste de la farce qu’on pourra servir en complément : un assortiment de légumes coupés en petits bouts et délicieusement assaisonnés.

Après la cuisine, le moment de mettre le couvert
Le repas est quasi prêt. Il est temps de mettre le couvert.

Il est midi passé. L’agitation de la matinée se calme pour un court moment. Gustave enfourne les samosas. Hélène met le couvert. Fatima range les ustensiles dans le lave-vaisselle. D’autres font une pause sur la terrasse. Marius prend note de convives supplémentaires. Et Marie-Claire, membre du conseil d’administration, prend le relais de Marius, l’animateur salarié, pour compléter l’histoire de l’association qu’il a commencé à me dérouler.

Nous sommes dans les locaux de Co-cooking, au premier étage d’une maison dont le rez-de-chaussée est occupée par les colocataires : l’atelier Un Guidon dans la tête, animé par l’association Tous Deux Roues. Pendant que les uns vous apprennent à réparer votre vélo, les autres, au-dessus, vous nourrissent.

Pour faire connaissance avec les colocataires de Co-cooking, lire aussi le reportage : « Tous Deux Roues popularise la culture vélo par l’autoréparation »

Un point d’ancrage

L’association Co-cooking est née en 2018 à Cournon, à l’initiative de Mathieu et de Dominique, laquelle avait commencé par un foodtruck nommé Roul’ma soupe, puis une cantine itinérante, surtout à base de légumes. « Ensuite ça a paru nécessaire d’investir des locaux. Ici, c’est le même concept, en dur », précise Marie-Claire.

Il y a eu cette opportunité de s’installer dans ces locaux appartenant à la Ville, dans le quartier de La Plaine à Clermont-Nord. Et depuis, la cantine du vendredi n’a pas désempli, en dehors des quelques périodes où elle s’est interrompue.

« Ça a paru nécessaire d’investir des locaux. »

Elle accueille les habitués et les personnes de passage, les adhérents et ceux qui viennent tester la formule, les gens du quartier et d’autres qui viennent de plus loin. Hélène, Rosa ou Brigitte sont de Croix-de-Neyrat, le quartier de grands ensembles tout proche. Marie-Claire ou Gustave se déplacent de Châtel-Guyon et Ménétrol. Les autres cuisiniers du jour se répartissent entre divers quartiers de la métropole.

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En toute liberté

Comment fonctionne Co-cooking ? « L’objectif de l’association est de créer du lien social et de faire que la bonne cuisine, avec des produits frais et de qualité, soit accessible à tous », explique Marius.

De la cuisine surtout végétale, précise Marie-Claire : « Ne serait-ce que parce que la viande coûte cher. Nous récupérons les légumes invendus de la Coop des Dômes. Chaque mardi, nous avons un café-menu pour décider en fonction de ces invendus ce que nous allons cuisiner, puis nous commandons le complément de légumes aux Jardins Solidaires de Gerzat et nous achetons les autres produits à la Coop des Dômes. La cantine fonctionne de façon stable tous les vendredis et parfois le samedi, pour permettre de venir à ceux qui travaillent et ne peuvent jamais venir les vendredis. »

Atelier cuisine
Marie-Claire, membre du conseil d’administration, ici au centre, pendant l’atelier cuisine du matin.

Le principe est très libre. Les adhérents peuvent arriver dès le matin pour participer à la confection des plats. Mais on peut venir juste pour le déjeuner. Quand on peut, on donne aussi un coup de main pour débarrasser la table, ranger, nettoyer.

Le prix aussi est libre, et l’adhésion aussi à partir de 2 euros. Et il n’y a pas d’obligation d’être adhérent pour se joindre à la tablée.

Cuisiner pour les autres

Vendredi dernier, outre les cuisiniers du matin, deux adhérentes ont invité une amie ou un voisin. Les permanents du Guidon dans la Tête prennent place autour de la table, tout comme trois membres d’une association amie, Chôm’Actif, qui a organisé un événement en sollicitant Co-cooking pour la préparation du buffet. « On devait ramener les plats mais en cours de route on s’est rendu compte que nous les avions oubliés », s’excuse Cathy, à la tête de la délégation, qui se réjouit d’avoir un prétexte pour revenir.

cuisine
L’association peut aussi préparer des repas ou des buffets-traiteurs pour des associations amies.

Car les cuisinières et (un peu plus rares) cuisiniers de Co-cooking œuvrent aussi pour d’autres structures. « Le jeudi est en général réservé à d’autres associations qui veulent se réunir autour d’un repas. Nous le leur préparons mais ils peuvent se joindre à nous. Et nous pouvons proposer un service de traiteur social pour des événements extérieurs », précise Marie-Claire.

Exemples de la semaine : les Rencontres solidaires de Chôm’actif le week-end précédent, un repas dans les lieux le jeudi pour une association de malvoyants, et le samedi, un repas pour une matinée bénévoles du Guidon dans la tête, qui aurait dû être suivi d’une balade à vélo si la pluie ne s’était pas invitée. « On a prévu une raclette pour que ça ne soit pas compliqué à préparer, parce que le samedi, Rémi ne travaille pas », explique encore l’administratrice.

Pour faire connaissance avec d’autres cuisinières solidaires, lire aussi le reportage : « Le vendredi au Biau Jardin, c’est popote solidaire »

Relance

Marius, c’est le pilier de l’organisation. Il coordonne l’activité, s’occupe de l’administratif, et met la main à la pâte au sens propre du terme. Il a fait repartir l’activité hebdomadaire, depuis son embauche en septembre dernier.

« Le financement est assuré jusqu’à juillet 2026, après on verra… »

« Jusqu’en juillet 2024, nous avions deux salariés à mi-temps, et on avait deux cantines toutes les semaines, relate Marie-Claire. Mais nous avons perdu un financement et nous avons dû renoncer à des postes salariés. Nous avons pu tout de même assurer quelques événements mais rien de régulier. Marius était alors bénévole et il s’est beaucoup investi. C’est pourquoi, en retrouvant des subventions, le conseil d’administration lui a proposé le poste. Le financement est assuré jusqu’à juillet 2026, après on verra… »

Co-cooking était à une centaine de bénévoles en 2024 ; cette année l’effectif est tombé à 75 en l’absence d’animation. Mais le retour des cantines a relancé les choses. Vendredi dernier, nous étions finalement 17 à se serrer un peu autour de la table. « On peut être jusqu’à 25. On ajoute une table. Et quand il fait beau il y a la terrasse en plus », témoignent les bénévoles.

Pour découvrir d’autres initiatives alliant solidarités et alimentation, lire aussi l’article : « Manger sain, local et… solidaire »

Belle tablée

À table, on parle de tout et de rien. On échange des recettes de cuisine. Cathy explique le fonctionnement de Chôm’actif. Dalila se plaint des difficultés d’une autre association où elle est engagée. Rosa explique qu’elle aime bien venir pour manger des légumes, car elle n’en cuisine pas à la maison : son fils ne les supporte pas.

On complimente les cuisiniers et cuisinières. On se ressert de kefir, on cherche un volontaire pour le dernier samosa. C’est une ambiance de grande famille, avec ses chamailleries parfois, mais surtout beaucoup de chaleur et de bienveillance.

L’ambiance chaleureuse et familiale des repas du vendredi.

Fin de repas. Tandis que les uns finissent leur café, d’autres emportent vers la cuisine adjacente les plats bien vidés et la vaisselle. Hélène essuie la table. Fatima s’empare du balai. Marie-Claire encaisse l’écot de chaque convive en veillant à ce que personne n’oublie de contribuer.

Certains doivent s’éclipser rapidement, emportant le cas échéant le panier de légumes commandé aux Jardins Solidaires, car on peut se faire livrer ici, en même temps que la commande de l’association.

Marius donne les dernières instructions pour le lendemain et la salle à manger retrouve peu à peu son calme. Jusqu’au lendemain, au café-menu du mardi ou au prochain vendredi…

L’association Co-cooking se situe 2, rue Louise-Michel à Clermont.
Pour la découvrir ou se renseigner, on peut venir au café-menu les mardis à 14h ou prendre contact par courriel : assocuisinepartage63@gmail.com
Pour réserver pour un repas du vendredi : 07 49 66 67 27

Reportage (texte et photos) Marie-Pierre Demarty, réalisé vendredi 24 octobre 2025. À la une : un moment de préparation du repas.

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