Le Projet alimentaire territorial du Grand Clermont et du parc Livradois-Forez innove dans sa méthodologie : des citoyens-consommateurs ont été invités à donner leur avis sur la distribution de légumes locaux dans les grandes surfaces. Récit d’une démarche au bon goût de légumes de saison.
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Mon ressenti
Pour cette démarche citoyenne sollicitée par le Projet alimentaire territorial, j’ai eu la chance de me transformer en petite souris. Pas celle qui va grignoter les carottes et les salades dans le garde-manger, mais celle qu’on rêve tous d’être un jour ou l’autre : discrète dans un tout petit coin, en observation, sans perdre une miette de ce qui se raconte. J’ai même pu me démultiplier pour avoir parfois des oreilles dans trois réunions en même temps, grâce aux miracles technologiques de l’enregistrement.
Car avant d’être à presque plein temps rédactrice pour Tikographie, j’ai rempli souvent ce genre de mission : celle de scribe, qui prend des notes et restitue une version écrite et lisible, synthétique et détaillée en même temps, de ce qui se passe ici ou là. En l’occurrence, j’étais sur cette mission en collaboration avec nos ami.e.s et consœurs-confrères du Connecteur, qui avaient la charge d’animer ce groupe, de faire en sorte que la mayonnaise prenne (pour les crudités) et que la démarche porte ses fruits (pour le rayon d’à côté).
Ça a été une très agréable mission.
Parce que nous avons eu plaisir à travailler avec une équipe du PAT efficace, motivée, enthousiaste, à l’écoute (mention spéciale à Moïra, à ses dons d’ubiquité et à son caddy vert-pomme !). Mine de rien, ce n’est pas un détail négligeable pour la réussite d’un tel projet.
Plaisir aussi à voir le groupe de citoyens-consommateurs, malgré quelques désistements lors des premières séances, aborder le projet d’abord avec une curiosité prudente, puis avec un intérêt grandissant et un sérieux incroyable. C’est tout l’enjeu de ce type de projets participatifs : on monte en compétence et – pourrait-on presque dire – en intelligence, en apprenant à écouter, à changer d’avis, à accueillir des informations qui ne vont pas dans le sens de nos certitudes. On monte aussi en complicité et en convivialité, ce qui contribue à la motivation.
J’en ressors avec la conviction renforcée qu’on devrait tous passer par ce genre d’expériences. La démocratie et les décisions collectives y gagneraient en pertinence.
Vous n’y croyez pas ? Chiche : essayez…
Marie-Pierre
La structure : le projet alimentaire territorial
Fédération d’initiatives et d’acteurs pour répondre à l’enjeu de relocalisation de l’alimentation sur le Puy-de-Dôme
Le Projet alimentaire territorial Grand Clermont – parc naturel régional du Livradois-Forez a été créé en 2017 par les deux entités que sont le Grand Clermont – regroupant la Métropole et les communautés de communes Mond’Arverne, Riom Limagne et Volcan et Billom communauté – et le parc Livradois-Forez qui s’étend sur 168 communes, principalement dans le Puy-de-Dôme.
Il a pour objet de fédérer un réseau d’initiatives et de structures aussi bien publiques, économiques ou associatives ayant vocation à améliorer l’autonomie alimentaire du territoire, dans une logique de faire dialoguer territoire rural et territoire urbain.
Il anime une réflexion collective autour du modèle alimentaire local, et mobilise les acteurs autour de nouvelles collaborations pour construire un système alimentaire plus vertueux, plus économe en ressources et plus équilibré entre les acteurs.
Le PAT a constitué des groupes-projets qui travaillent sur six thématiques :
- Agir sur le foncier agricole avec les collectivités
- Formation et évolution des pratiques agricoles
- Intégrer les enjeux du PAT dans les démarches territoriales de santé
- Jardins et alimentation
- Logistique d’approvisionnement local innovante
- Restauration collective locale.
Les principaux points à retenir
- Le Projet alimentaire territorial du Grand Clermont et du parc Livradois-Forez a invité une trentaine de volontaires, en tant que citoyens-consommateurs, à plancher ensemble pour produire un avis sur la distribution de légumes locaux.
- La question à laquelle ils devaient répondre : « Quels sont vos critères ou caractéristiques principaux pour un développement plus durable et plus juste de la production locale de légumes distribués en grandes et moyennes surfaces (GMS) ? »
- Ils ont participé à six sessions de travail d’une demi-journée, entre septembre 2022 et janvier 2023, pour visiter des exploitations maraîchères et des grandes surfaces, rencontrer des chercheurs et experts, mettre en commun, délibérer, construire un consensus, produire leur avis.
- Cet avis a fait l’objet d’une première restitution la semaine dernière : il s’agit d’un document de 17 pages, reprenant la démarches, les constats, les conclusions du groupe et cinq préconisations adressées à la grande distribution.
- Le PAT a maintenant pour mission de diffuser et faire connaître cet avis, convaincre, faire en sorte qu’il soit suivi d’effets.
Ils se sont embarqués dans l’histoire avec conviction ou une pointe de scepticisme, avec curiosité ou pour saisir l’occasion, pour une fois, de donner leur avis. Ou pour le simple plaisir de rencontrer du monde. Souvent aussi avec quelques idées préconçues, voire bien arrêtées. Mais en tout cas, ils se sont embarqués.
Pour un petit voyage de six demi-journées, réparties entre septembre et janvier dernier. Six samedis matin qu’ils auraient pu passer à faire leurs courses au marché ou à l’hyper-marché, à jardiner, à cuisiner des légumes ou à tout autre chose. Mais ils ont choisi de donner de leur temps pour réfléchir ensemble à une question : « Quels sont vos critères ou caractéristiques principaux pour un développement plus durable et plus juste de la production locale de légumes distribués en grandes et moyennes surfaces (GMS) ? »
La question leur était posée par le Projet alimentaire territorial du Grand Clermont et du Parc naturel Livradois-Forez (je me permettrai de le nommer PAT GC/LF dans le reste de l’article). Une instance qui s’est fixé comme objectif de parvenir d’ici à 2050 à une production locale de légumes équivalente à 50% des besoins du territoire.
Une petite convention citoyenne
Pourquoi consulter des citoyens-consommateurs sur cette question ? Jean-Pierre Buche, vice-président du Grand Clermont en charge du PAT1, l’a expliqué au panel lors de la première session : « Nous avons eu des revers dans des démarches antérieures car il manquait un maillon essentiel : les consommateurs. Vous avez des éléments de connaissance que nous n’avons pas. L’intérêt est de faire se confronter les différents avis, avec le filtre important du développement durable. » Dans le même temps, il a été précisé au groupe que l’avis rendu par le panel n’aurait pas force de loi, mais serait, poursuivait Jean-Pierre Buche, « un outil de lobbying, un argument de fond pour convaincre les producteurs et distributeurs d’aller dans la bonne direction. Devant les conseils syndicaux ou les distributeurs, l’avis de quarante personnes a du poids. »
« Nous avons eu des revers dans des démarches antérieures car il manquait un maillon essentiel : les consommateurs.”
Jean-Pierre Buche
L’autre question qui a tracassé les participants initialement était le choix d’orienter la problématique sur les super et hypermarchés. Nathalie Boudoul, vice-présidente du Parc Livradois-Forez en charge du PAT, les a éclairés : « Rappelons que 63% des achats de fruits et légumes frais se font en GMS : cela paraît difficile de les contourner et ce segment nécessite un accompagnement pour faire évoluer les habitudes. »
Une fois les éclaircissements fournis, il a été proposé au groupe de fonctionner comme une petite convention citoyenne, à ceci près que les personnes ont été recrutées sur la base du pur volontariat, par un appel sur divers canaux de communication, et constituaient un échantillon plus aléatoire que représentatif de la population du territoire. Premier constat : une majorité écrasante de femmes (aurions-nous un même profil s’il s’était agi d’un avis sur la viande ? ou sur la téléphonie mobile… ?). Par contre il a été pris soin de constituer un panel bien réparti entre les trois bassins de population d’Ambert, Thiers et Clermont, de façon à pouvoir constituer des groupes de travail sur certaines séances.
Apprentissage et délibération
A partir de là, la trentaine de participants assidus s’est instruite. Pas dans les livres, mais de façon très concrète, sur le terrain et face à des experts. Visite chez des producteurs, dans des grandes surfaces. Rencontre de spécialistes des méthodes agricoles, des labels, de la fixation des prix, du gaspillage alimentaire ou des questions hydrologiques, de responsables de groupements de producteurs, etc. Au total, répartis en trois groupes, les consommateurs-citoyens se sont déplacés sur six sites différents et ont pu échanger avec neuf chercheurs ou experts de terrain. Puis ils se sont retrouvés pour mettre en commun ce qu’ils ont appris, phosphorer ensemble, partager leur vision d’un « rayon légumes idéal », compiler ce qui leur semblait important, débattre de ce qui faisait débat, construire peu à peu les briques de leur avis.
« J’avais des a priori sur la grande distribution et j’ai été agréablement surprise. »
Une participante du groupe d’Ambert
Mais aussi pour s’étonner ensemble de tout ce qu’ils ont pu apprendre, des idées reçues qu’ils ont démontées, des états d’âme et émotions diverses par lesquelles ils sont passés.
« Ma découverte de la journée, c’est que la bio puisse aussi être industrielle », témoignait une Thiernoise lors du débriefing de la deuxième session. « J’avais des a priori sur la grande distribution et j’ai été agréablement surprise », confie une Ambertoise en fin de session suivante. « On s’attaque à un problème beaucoup trop gros », constatait le groupe d’Ambert assez dérouté en découvrant la complexité des mécanismes de fonctionnement du système par rapport à l’idée qu’ils s’en faisaient. Mais au finale, les choses se sont décantées.
Une travail de précision
Tout de même, quelques points de discussion ont particulièrement alimenté les discussions. Exemple : le groupe se désole de constater qu’il ne manquerait pas grand-chose pour que les producteurs de légumes locaux et la grande distribution fassent affaire ensemble. Mais les préjugés des uns, le manque de temps des autres, la difficulté à se parler et à s’adapter aux contraintes de chaque métier… Même si des avancées existent, les petits grains de sable qui bloquent la machine auraient manifestement besoin d’un coup de pouce ou d’un médiateur pour être balayés.
Autre partie prenante à mobiliser : les consommateurs, qui eux aussi ont leurs contraintes, leurs a priori, leur paresse et même leurs (vastes) zones d’ignorance. Par exemple, il a bien été noté que tous les labels et certifications ne se valent pas, mais que leur multiplication crée d’énormes confusions.
Après « mise en texte », par les animateurs de la démarche, de tout ce qui avait été mouliné, brassé, épluché et mijoté durant ces matinées de travail, une dernière séance a eu pour objet principal de passer le long texte de l’avis en revue, paragraphe par paragraphe, pour modifier ici un détail, là toute une partie qui ne semblait pas à sa place, plus loin une formulation qui chiffonnait certains. Tout cela avec une belle qualité de discussion, une précision, une écoute, une recherche (fructueuse) du consensus. « Je n’avais plus tellement confiance dans le collectif et finalement ça fonctionne bien », reconnaissait un des participants à l’heure de conclure cette ultime session.
Le point de vue de Moïra Ango, animatrice du PAT
« La méthode a fait ses preuves et nous donne envie de la reproduire »
Moïra-Elisabeth Ango est l’animatrice du Projet alimentaire territorial du Grand Clermont et du parc Livradois-Forez. En complicité avec Etienne Clair, responsable du pôle développement du parc, et Jérôme Prouhèze, directeur adjoint du Grand Clermont, elle a coordonné l’ensemble de la démarche.
Au terme de la démarche, est-ce que le résultat correspond à vos attentes ?
Nous avions bien spécifié initialement que nos attentes étaient celles d’un test mais nous n’avions pas d’attentes de résultats précis. Ces démarches se font chemin faisant, avec des résultats aléatoires. Ensuite, c’est notre travail, à nous équipe PAT, de savoir valoriser et diffuser de qui a été produit. Dans ce sens, l’exercice a répondu largement à ces attentes.
Au-delà, en termes de contenu, nous sommes parvenus à toucher à des éléments assez précis, que nous n’avions pas forcément envisagés au départ. Nous avons réussi à tirer des fils très intéressants et fins sur les questions d’environnement, sur la qualité des produits.
Enfin en termes de démarche collective, on ne s’attendait peut-être pas à ce que ça réussisse aussi bien : la démarche a soudé un groupe autour d’une question pas simple à aborder ; les participants semblent avoir été marqués par la démarche : ils nous ont témoigné que ça avait changé leur vision, leur comportement d’achat. De même dans la diffusion que nous commençons à faire de l’avis, on sent qu’il y a des retours positifs : un intérêt des opérateurs économiques, des GMS, grossistes, etc.
Pour le PAT, c’était une première expérience de sollicitation de citoyens. L’expérience est-elle concluante ? Peut-elle infléchir la façon de travailler du PAT ?
C’est effectivement la première fois qu’on associait directement des citoyens à des projets du PAT, même si nous travaillons avec des associations qui portent la parole citoyenne. Cela a changé beaucoup de choses chez nous en termes de méthodologie. C’était par exemple un exercice important de parvenir à expliquer ce que nous faisons de manière concrète. Cela répond à une attente, que nous avons depuis plusieurs années, de parvenir à éclairer les choix de tous les acteurs du territoire sur le sujet complexe du système alimentaire et ses problématiques. La méthode que nous avons déployée là a fait ses preuves. Il y a certainement encore des choses à creuser et améliorer, mais c’est une belle réussite.
Et cela nous donne envie de reproduire cette démarche sur d’autres sujets d’une part, et de continuer à diffuser le travail de diffusion de l’avis en y associant les citoyens qui ont participé. Ce sera encore un nouvel exercice.
Plus précisément, que devient l’avis maintenant ?
C’est vrai que le travail dans le dur commence maintenant ! Il faut qu’on arrive à le diffuser pas seulement aux GMS, mais à tous les acteurs du territoire, et à le promouvoir avec le groupe. Concrètement, les prochaines étapes sont une présentation au comité de pilotage qui a accompagné la démarche et un temps consacré à ce travail lors de notre forum alimentaire fin mai ; nous souhaitons aussi le présenter largement aux élus de nos instances pour qu’ils s’approprient le projet, et retourner voir tous les opérateurs économiques de la filière avec qui nous avons été en contact, car nous avons besoin de relais : nous ne pourrons pas tout porter seuls. Enfin, la diffusion de l’avis va permettre non seulement de sentir comment il est perçu, mais aussi de capter les éléments sur lesquels on va devoir travailler.
Au-delà des acteurs publics et économiques, le travail du groupe a mis aussi en avant le rôle des consommateurs, dont les comportements doivent aussi évoluer. Avez-vous la possibilité de jouer un rôle à ce niveau ?
On ne pourra s’emparer que d’une petite partie de cette question. Mais comme on le répète souvent, ce ne sont pas les pilotes qui font le projet, mais l’ensemble des partenaires qui s’y impliquent. Nous avons donc une co-responsabilité dans la diffusion de l’information aux habitants. Pour notre part, nous diffusons depuis plusieurs années un maximum d’informations sur le système alimentaire.
J’ai quand même l’impression que, comme on l’a vu lors de la restitution, tous les acteurs sont attentifs à cette question de la bonne information, de la transparence, pour permettre des choix éclairés. Cette question est dans l’air du temps. Cependant, il est clair que le comportement des consommateurs est déterminé par plein d’autres paramètres sur lesquels nous n’avons pas forcément prise…
Comment as-tu personnellement vécu et ressenti la démarche ?
C’était pour moi un exercice nouveau et pas toujours simple : il a fallu jouer avec la logistique et les contenus d’intervention, veiller à un équilibre pour être à la fois exhaustif mais sans inonder les participants d’informations, pour maintenir la mobilisation. C’était un travail subtil, mais que j’ai adoré faire. C’est un public différent, auquel on ne dit pas les mêmes choses qu’à nos interlocuteurs habituels ; on est moins techno-centré. Mais il y a des apports d’usages très éclairants pour la manière dont nous devons approcher la question du développement des filières.
Ça a donc été un exercice intellectuel hyper intéressant, un travail au quotidien très enthousiasmant… même s’il fallait travailler le samedi. J’ai adoré ça !
Une fin et un début
Jeudi dernier, le PAT GC/LF organisait un événement de restitution de cet avis devant un parterre d’acteurs de la filière, experts, élus, participants… Une date qui marquait à la fois la fin et le début de la démarche, car le PAT se donne maintenant pour mission de faire vivre cet avis, de le faire connaître et faire en sorte qu’il trouve des applications et aboutisse à des résultats.
Ce document de dix-sept pages retrace la démarche et restitue les constats du groupe, avant de livrer leurs préconisations qui s’adressent aux responsables des grandes et moyennes surfaces du territoire – du moins, pour commencer, aux « pionniers convaincus » dont ils ont été heureux de relever l’existence. Ce choix n’exclut pas le rôle d’autres acteurs, des producteurs aux consommateurs en passant par les intermédiaires de la filière, le monde associatif, les acteurs publics… Mais en rappelant que ces distributeurs concentrent 67% des achats alimentaires du territoire, l’avis souligne leur capacité à agir et à faire levier.
Les propositions de l’avis se répartissent en cinq points que détaille le document :
- Proposez des légumes qui soient « vraiment » de qualité et de proximité,
- Assurez une information transparente,
- Donnez envie de choisir des produits locaux de qualité, de créer des liens,
- Donnez les clefs pour valoriser une alimentation plus saine,
- Donnez le goût de la cuisine, inspirez.
Si on devait résumer les rêves qui ont muri dans le groupe de nos citoyens consommateurs, leur vision ressemble à un monde où les producteurs locaux, cultivant selon les méthodes les plus respectueuses possibles de l’environnement et des personnes, parviennent à se mettre en lien direct avec les GMS et à se coordonner entre eux pour répondre aux besoins de celles-ci, et où les consommateurs trouvent à l’intérieur même des supermarchés l’information et l’animation à même de faire évoluer leurs comportements alimentaires. Des embryons d’un tel modèle sont déjà en place. Reste à le développer et à le généraliser.
Les réactions à la restitution
« Nous avons tous un peu changé »
Extrait des réactions, témoignages et (embryons de) débats qui ont suivi la présentation de l’avis, jeudi dernier.
Cécile, du groupe d’Ambert (parlant au nom du groupe) : « C’était une super expérience d’avoir vécu cette démarche et d’avoir réussi à produire un avis qui fasse consensus, malgré nos points de vue parfois très divergents. Les visites et les rencontres avec les experts nous ont beaucoup éclairés et nous avons maintenant le sentiment d’être des consommateurs qui savent ; même si nous avons nos contraintes et nos difficultés, nous essayons de faire mieux dans nos actes d’achat. »
Stéphanie, du groupe de Thiers : « C’était très intéressant de passer, à chaque session, d’une expérience individuelle à une expérience et une réflexion collective. Nous allons d’ailleurs continuer à échanger. »
Michèle, du groupe de Clermont : « Nous avons tous un peu changé. Au cours de ces cessions, nous avons reçu beaucoup, voire trop d’informations, puis petit à petit ça s’est construit de façon positive. Nous avons perçu le côté humain qui ressort de nos visites aux GMS ; nous y avons rencontré des personnes qui ont des contraintes, mais qui ont à cœur de faire leur métier le mieux possible. »
Muriel, du groupe de Thiers (à distance) : « J’ai beaucoup apprécié de pouvoir donner mon avis. »
Gérald Gounon, directeur d’Auchan Nord : « Je me rends compte que ce que nous essayons de faire correspond aux attentes des citoyens. Est-ce qu’on va assez loin ? Il faudra qu’on creuse et qu’on analyse le détail de l’avis pour voir comment nous pouvons encore nous améliorer. »
Fabrice Moulin, directeur de Terre Azur, grossiste en fruits et légumes locaux, qui accueillait la soirée de restitution : « J’ai découvert le projet aujourd’hui et j’aurais adoré y participer. Nous (professionnels) sommes aussi des consommateurs. Nous avons la chance d’être un pays plutôt bien positionné sur ces questions alimentaires, car il est quasiment génétique de faire attention à ce qu’on mange. Continuons à y être attentifs et soyons tous acteurs de ces questions. »
Vincent Pottier, responsable commerce artisans à Auchan Nord (répondant à une question sur les possibilités de mettre en œuvre une animation et une meilleure information sur les fruits et légumes locaux) : « C’est vrai qu’il y a moins de moyens marketing sur les rayons légumes et davantage sur les produits transformés, car le plus souvent, ce sont les marques qui financent ces animations. Ce sont des points sur lesquels on a à réfléchir. »
Yuna Chiffoleau, directrice de recherche en sociologie à l’INRAE : « Pour avoir suivi d’autres démarches citoyennes ailleurs, y compris en Île-de-France, je constate qu’au-delà des spécificités des territoires, les avis rendus sont finalement convergentes. On constate aussi un décalage entre les attentes et ce qui se passe réellement ; par exemple, lorsqu’il y a des partenariats entre la GMS et des producteurs locaux, surtout si ce sont des partenariats dans la durée, cela se passe plutôt avec de grosses exploitations agricoles. Enfin, une question se pose : l’approvisionnement local en GMS est bloqué par une sorte de norme, qui est l’exigence de légumes zéro défaut. Les distributeurs se défendent en arguant que c’est une demande des consommateurs… Pourra-t-on à se débarrasser de ce critère, qui permettrait plus facilement la relocalisation ? »
A écouter les réactions de la salle, jusqu’aux responsables de l’unique grande surface qui s’étaient déplacés, on peut s’imaginer qu’on est sur la bonne voie… Sauf à considérer que les présents de jeudi dernier étaient surtout les plus convaincus, et qu’entre les intentions et la mise en pratique, la marge est souvent plus grande que celle que font les magasins sur le prix des carottes. Au moins, les intentions sont présentes et la volonté – politique et citoyenne – a franchi un pas localement. Comme on dit dans les journaux : affaire à suivre…
1. Il a entretemps été remplacé à ce poste par Marc Regnoux.
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Reportage réalisé entre septembre 2022 et mars 2023. Photo de Une : le groupe de Clermont en visite au Biau Jardin à Gerzat – Crédit Marie-Pierre Demarty