Le maire de Pérignat-les-Sarliève est le nouveau vice-président métropolitain à la transition écologique. Il revient sur son engagement pour la biodiversité et l’agriculture durable.
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Mon ressenti
Après avoir traité les “coulisses” du Schéma de Transition Energétique et Ecologique [STEE] de la Métropole dans un entretien avec Nathalie Bejot-Seeboth et Violaine Magne, l’étape logique suivante consistait à rencontrer le vice-président en charge de ce dossier. C’est chose faite avec Eric Grenet, par ailleurs maire de Pérignat-les-Sarliève, qui nous détaille dans cet article sa vision de la transition sur le territoire.
Si sa prise de poste est récente (début 2022) et ne permet pas suffisamment de recul sur les actions engagées, il me semble que cela témoigne de la volonté métropolitaine de “réaligner les planètes”, entre une équipe du STEE très engagée et une vice présidence jusqu’ici moins impliquée.
Espérons qu’avec la nomination d’Eric Grenet à ce poste, au vu de ses propos sur la biodiversité, la restauration des écosystèmes et l’agriculture durable, le lien entre les aspects politique et opérationnel de la transition écologique fonctionne pleinement.
Damien
Les principaux points à retenir
- Eric Grenet est vice-président métropolitain en charge de la transition énergétique et écologique depuis janvier 2022, suite à la démission d’Anne-Marie Picard, maire de Ceyrat. Selon lui, la thématique générale du “développement durable” ne lui est pas réservée, mais au contraire partagée avec de nombreuses autres directions. Par ailleurs, il insiste sur les “référents transition” qui accompagnent les autres vice-présidents, et sur les commissions thématiques. Enfin, il reconnaît que la recherche de consensus rend les processus longs mais, selon lui, plus cohérents et efficaces.
- Sur les thématiques de la biodiversité et de l’agriculture durable, Eric Grenet semble particulièrement sensible et engagé. Son approche est celle d’une économie locale, de circuits courts et de produits sains. Il travaille notamment avec Jean-Marie Vallée (de Pont-du-Château) sur la biodiversité, les “trames” urbaines et la gestion de l’eau, mais aussi sur la Ceinture Verte ou encore le Projet Alimentaire Territorial. A côté, il est aussi impliqué dans les réflexions autour de l’énergie (réseaux de chaleur) et les déchets. Il semble enfin apprécier le travail avec les élus écologistes qui ont, selon ses mots, une “vision qui peut être avant-gardiste”.
- Désormais en charge du Schéma de Transition Energétique et Ecologique [STEE] de Clermont Métropole, il reconnaît des progrés réels sur le photovoltaïque, les réseaux de chaleur et les déchets, mais souhaite plus d’efforts sur l’adaptation des écosystèmes et la place de l’arbre en ville. Il constate aussi la problématique d’un manque de sensibilisation du grand public aux enjeux écologiques, même si certaines actions spécifiques sont mieux connues. Il reste cependant une forte incertitude sur la capacité de changement et d’adaptation des citoyens face aux contraintes nées du changement climatique.
- Selon lui, la transition des territoires doit être coordonnée par les collectivités locales, notamment via l’expérimentation, mais avec le soutien d’acteurs financiers (jusqu’au niveau européen), et pourquoi pas des partenariats avec des grandes entreprises – à voir au cas par cas, selon l’urgence des dossiers. Quant aux associations, elles sont selon lui pertinentes dans une logique de défense de l’environnement.
- Enfin, à Pérignat-les-Sarliève, Eric Grenet suit avec intérêt le projet de la Ferme de Sarliève, qui développe une approche de l’agriculture pensée autour de l’humain et de la biodiversité. Il travaille également sur la mobilité douce, la mesure de la qualité de l’air et la sensibilisation à la nature en ville par les parcs et le classement Natura 2000.
L’intervenant : Eric Grenet
Maire de Pérignat-les-Sarliève depuis 2020 ; vice-président à Clermont Auvergne Métropole en charge de la transition énergétique et écologique depuis 2022
Natif de Pérignat-les-Sarliève, Eric Grenet suit des études de droit à la faculté de Clermont. Au niveau professionnel, il poursuit une carrière dans le secteur bancaire et financier. En parallèle, il s’engage dès ses 18 ans dans le monde associatif local.
En 2001 débute son parcours politique : élu et conseiller municipal en 2001 (en charge du Conseil Municipal des Jeunes de Pérignat), il devient adjoint aux finances en 2014, puis conseiller métropolitain délégué à l’agriculture urbaine et à la ceinture maraîchère en 2020.
En janvier 2022, il reprend la vice-présidence de la Métropole en charge de la transition énergétique et écologique, suite à la démission d’Anne-Marie Picard qui occupait ce poste depuis 2020.
Contacter Eric par courrier électronique : egrenet [chez] clermontmetropole.eu |
Crédit photo : Clermont Auvergne Métropole (DR)
Accès direct aux questions
- Vous avez été nommé en janvier vice-président en charge du “Développement durable et de la Transition énergétique et écologique”. Comment travaillez-vous avec les autres élus ?
- Il y a eu un changement en cours de mandat à la tête de votre direction, pourquoi ?
- Le travail sur les dossiers liés à la transition écologique n’est-il pas rendu complexe de par l’organisation au sein de la Métropole ?
- Vous êtes “non-inscrit”, politiquement. Quels sont vos rapports avec les élus écologistes ?
- 2022, c’est l’année du “point d’étape” du STEE [Schéma de Transition Energétique et Ecologique], la feuille de route de la Métropole en développement durable. Quel bilan en tirez-vous à ce stade ?
- La “transition énergétique” n’est-elle pas trop mise en avant parmi les enjeux écologiques ?
- Et, selon vous, les citoyens sont-ils prêts pour cette transition ?
- Comment faut-il mener la transition avec les autres acteurs du territoire ?
- Vous avez une vraie sensibilité sur l’agriculture urbaine, pour laquelle vous étiez conseiller métropolitain délégué …
- Comment Clermont Métropole peut-elle progresser sur l’agriculture de proximité ?
- Le territoire est-il vulnérable aux aléas climatiques impactant l’agriculture ?
- En tant que maire de Pérignat, vous êtes impliqué dans le projet de la Ferme de Sarliève, justement. Quelle vision en avez-vous ?
- Quels sont les autres axes de transition écologique sur lesquels vous travaillez à Pérignat ?
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Vous avez été nommé en janvier vice-président en charge du “Développement durable et de la Transition énergétique et écologique”. Comment travaillez-vous avec les autres élus ?
Déjà, il faut préciser que le développement durable ne m’est pas rattaché exclusivement. C’est une thématique transverse avec de nombreuses autres directions – par exemple les déchets, l’eau, la mobilité … le but recherché étant de ne pas “siloter” cette thématique, d’associer les projets et les initiatives.
Je peux affirmer que tous les vice-présidents ont pris la mesure des enjeux du développement durable et agiront en ce sens. D’autant plus qu’il y a un “référent transition” auprès de chacun d’entre eux. Enfin, pour ma part, je traite directement des sujets qui ne sont pas rattachés à une direction spécifique, par exemple avec la qualité de l’air.
Il y a eu un changement en cours de mandat à la tête de votre direction, pourquoi ?
En effet, l’ancienne vice-présidente au développement durable était Anne-Marie Picard, maire de Ceyrat. Elle a simplement choisi de se concentrer sur sa ville, et sur le Conseil Départemental dont elle est également vice-présidente.
Le but recherché est de ne pas “siloter” [le développement durable], d’associer les projets et les initiatives.
Notre passation de pouvoirs s’est faite dans le cadre d’un accord politique respectant les équilibres au sein de la Métropole, et validé par un vote du Conseil Métropolitain en janvier. D’ailleurs, ma délégation précédente à l’agriculture urbaine a été reprise par Anne-Marie Picard.
Le travail sur les dossiers liés à la transition écologique n’est-il pas rendu complexe de par l’organisation au sein de la Métropole ?
Complexe, non. Mais c’est vrai que nous travaillons dans la durée. Si les résultats peuvent mettre du temps à émerger, ils le font dans une logique de cohérence et de consensus. Puisque plusieurs vice-présidents – et leurs directions associées – travaillent en commun, les décisions sont mieux argumentées, et les projets plus efficaces.
Je pense par exemple au dossier en cours entre moi et Laurent Brunmurol, maire de Romagnat et Vice-Président à la Métropole en charge des déchets (notamment) : nous travaillons sur l’extension du réseau de chaleur Saint-Jacques Plus. Cela se fait bien sûr avec la direction du service des déchets, mais aussi le Valtom. Même logique avec les vice-présidents auprès du monde économique, Henri Gisselbrechts et Sylvain Casildas.
Enfin, nous travaillons aussi au sein de commissions thématiques. Je suis particulièrement impliqué dans celle portant sur la biodiversité, au sein de laquelle je travaille avec Jean-Marie Vallée, adjoint à la mairie de Pont-du-Château et Vice-Président en charge de l’agriculture, de l’alimentation, de la biodiversité et des espaces naturels. Grâce à ces commissions, nous pouvons avancer concrètement sur des sujets comme la “trame noire” ou la gestion de l’eau. Ça fonctionne bien !
Vous êtes “non-inscrit”, politiquement. Quels sont vos rapports avec les élus écologistes ?
Ce sont des rapports constructifs. Je travaille notamment avec Anne-Laure Stanislas et Nicolas Bonnet, de la mairie de Clermont. Pour l’instant, cela passe par des points mensuels, mais l’organisation reste à élaborer.
Pour moi, ces élus engagés dans l’écologie sont particulièrement intéressants car ils ont à la fois une expertise mais aussi une vision qui peut être avant-gardiste. Autrement dit, ils ont pu détenir une vérité que certains ne voulaient pas entendre et qui s’impose à nous aujourd’hui.
2022, c’est l’année du “point d’étape” du STEE [Schéma de Transition Energétique et Ecologique], la feuille de route de la Métropole en développement durable. Quel bilan en tirez-vous à ce stade ?
Au niveau des belles réussites, le STEE nous a aidé à progresser sur le photovoltaïque, que ce soit sur les ombrières de parkings ou sur les toits des bâtiments communaux. Également sur les réseaux de chaleur – j’en parlais avec Saint-Jacques – et plus globalement sur la valorisation des déchets : on en est à 48% sur la Métropole.
Que manque-t-il ? Globalement, j’aimerais qu’il y ait davantage de mesures concernant l’adaptation des écosystèmes. Je pense notamment aux arbres, en ville et autour, qui sont directement menacés par le dérèglement climatique. Mais aussi à nos vignes, fragiles, dans lesquelles il faudrait intégrer des cépages du sud.
J’aimerais qu’il y ait davantage de mesures concernant l’adaptation des écosystèmes.
Enfin, les gens ne connaissent pas forcément le STEE. Il faudrait élargir notre public, au-delà des personnes intéressées a priori par les enjeux écologiques. Mais on se demande constamment comment faire ! Il y a des moyens cependant, comme les Fresques du Climat, qui marchent bien auprès des jeunes et qui touchent ainsi les parents.
La “transition énergétique” n’est-elle pas trop mise en avant parmi les enjeux écologiques ?
En tous cas, c’est le sujet le plus visible : parce qu’il concerne les émissions de CO2, les énergies fossiles, le climat … et donc toutes les activités humaines. C’est aussi à la fois notre levier d’action le plus important, et le premier impact que nous ressentons. Par exemple, les coûts de fonctionnement des collectivités ont augmenté de 40% depuis décembre à cause de la crise énergétique ! Ce sont autant d’investissements que nous ne pourrons pas réaliser.
Et, selon vous, les citoyens sont-ils prêts pour cette transition ?
Ce qui est sûr, c’est qu’ils prennent peu à peu conscience de nos actions au niveau de la Métropole : les trames bleues, les trames vertes, l’atlas de la biodiversité par exemple … sont relativement bien connus.
Néanmoins, je pense que les citoyens ne sont pas prêts à renoncer à certaines choses. Par exemple avec l’objectif “zéro artificialisation nette” pour 2050, il faudra mettre fin au pavillon individuel avec jardin. Les gens y sont-ils prêts aujourd’hui ? Cela dépendra des modèles mis en place, notamment au sujet de la nature en ville. Mais il y a beaucoup d’incertitude.
Comment faut-il mener la transition avec les autres acteurs du territoire ?
Les collectivités locales sont motrices dans la transition, parce qu’elles mettent en œuvre la plupart des politiques, mais aussi parce qu’elles peuvent expérimenter en local, ou accompagner les autres acteurs – comme avec la “prime air bois” pour les particuliers. Tout cela a un coût bien sûr. Les aides de l’ADEME, de l’Etat, du FEDER [Europe] sont nécessaires si les collectivités veulent franchir ce cap de la transition. Pour les différents projets, il peut être compliqué d’accélérer dans certains domaines comme l’eau ou l’énergie. C’est là que des partenariats sont nécessaires.
Je suis convaincu de l’intérêt des régies publiques, pour la gestion de l’eau en particulier.
Faut-il étendre ces partenariats aux grandes entreprises ? Cela dépend des sujets … Personnellement, je suis convaincu de l’intérêt des régies publiques, pour la gestion de l’eau en particulier. Mais, dans d’autres domaines, la collectivité ne peut pas tout porter. Or, il faut avancer vite, et certains grands groupes ont une force de frappe très importante.
Enfin, le monde associatif est très diversifié quand il s’agit de défendre l’environnement. Jusqu’ici, nous travaillions en lien avec Alternatiba 63 pour organiser des rencontres citoyennes dont nous sommes preneurs. Mais elles n’auront pas lieu en 2022 sous le même format que l’année dernière. Pour les autres associations, nous veillons à ne pas en favoriser l’une plus que l’autre.
Vous avez une vraie sensibilité sur l’agriculture urbaine, pour laquelle vous étiez conseiller métropolitain délégué …
C’est vrai. Mon approche est qu’une alimentation saine et variée est primordiale pour nous maintenir en bonne santé. Pour ce faire, on peut mettre en place un cercle vertueux : si la production et la consommation alimentaires sont proches, moins de gaz à effet de serre seront émis, et plusieurs emplois locaux pourront être créés. Tout cela a beaucoup de sens.
Néanmoins, c’est un changement de modèle agricole à accompagner. La Limagne, par exemple, reste encore sur le schéma des “grandes cultures” céréalières – même si Limagrain explore de nouveaux débouchés. Heureusement, la nouvelle génération d’agriculteurs cherche à diversifier sa production.
Comment Clermont Métropole peut-elle progresser sur l’agriculture de proximité ?
Il y a plusieurs leviers déjà mis en place. Par exemple, le Projet Alimentaire Territorial [PAT] du Grand Clermont vise l’autonomie partielle en alimentation, et une “agriculture valorisante”. D’autres acteurs ou d’autres projets, comme Auvabio, la Ferme de Sarliève … avancent sur le sujet.
Le dernier progrès réside dans le lancement de la SCIC [Société Coopérative d’Intérêt Collectif] “Ceinture Verte” début 2022. C’est une société qui permet de porter les investissements en infrastructures – serres, locaux – pour faciliter l’installation des maraîchers autour de Clermont. En d’autres termes, ce sera la SCIC Ceinture Verte qui prendra les risques financiers !
Le territoire est-il vulnérable aux aléas climatiques impactant l’agriculture ?
Hélas, oui. D’abord par les écarts de températures, renforcés par l’effet cuvette et le changement climatique. On l’a vu en particulier par la fragilisation des forêts. Mais il y a aussi la pluviométrie beaucoup plus irrégulière, avec des averses et des orages qui frappent d’un seul coup et très fort. Notre territoire ne connaissait pas cela auparavant …
En tant que maire de Pérignat, vous êtes impliqué dans le projet de la Ferme de Sarliève, justement. Quelle vision en avez-vous ?
La ferme de Sarliève, c’est un travail d’agriculture de proximité mais aussi d’entrée de Métropole. On est passé d’un projet d’implantation Ikea à une plaine céréalière en mutation, avec des haies, un plan de paysage, des arbres, du maraîchage, de l’élevage …
Pour moi, il s’agit de donner une dimension différente à la plaine entre Pérignat et Cournon. De lui rendre de la vie pour les humains – avec des usages mixtes autour de l’agriculture et de la sensibilisation – mais aussi des habitats pensés pour la biodiversité.
Quels sont les autres axes de transition écologique sur lesquels vous travaillez à Pérignat ?
Il y a plusieurs sujets comme l’accès à Pérignat en vélo, ce qui implique de traiter la problématique du rond-point côté Aubière – probablement avec un tunnel mobilité douce. Également, nous avons relayé l’initiative des capteurs ATMO Auvergne pour mesurer la qualité de l’air. Si cette qualité est plutôt bonne, je trouve ça intéressant de sensibiliser en permettant la mesure de données.
Je trouve que la biodiversité apporte du sens à la vie.
Enfin, Pérignat se situe au pied du plateau de Gergovie. De fait, une partie du territoire de la commune se trouve en zone “Natura 2000”. On observe parfois des chevreuils ou des sangliers sur le terrain de foot municipal, ou dans le parc ! Je trouve que la biodiversité apporte du sens à la vie, et à la ville. Natura 2000, c’est un périmètre bien précis, qui limite les aménagements réalisables, mais qui n’est pas forcément connu. On travaille à le valoriser, car c’est un atout pour notre ville.
Pour aller plus loin (références proposées par Eric Grenet) : Pour agir – “s’évader, randonner, observer, constater les changements autour de chez soi” |
Retour sur quatre acteurs locaux engagés, point sur Tikographie, sortie du recueil “l’année tiko 2024”, message de notre ennemi juré, buffet végé…
Tout cela à la Soirée Tiko 2024, jeudi 5 décembre à 18h à la Baie des Singes ! On s’y retrouve ?
Propos recueillis le 8 avril 2022, mis en forme pour plus de clarté puis relus et corrigé par Eric Grenet. Crédit photo de Une : Damien Caillard, Tikographie.